Pascal Darbon : « Mon investissement en pédagogie m’a donné une certaine légitimité en enseignement » DU Pédagogie de l'enseignement supérieur

Le DU PES – Diplôme d’université de Pédagogie de l’enseignement supérieur – permet aux enseignants de l’Université de Strasbourg d’approfondir leurs connaissances en matière de pédagogie et de se former à des méthodes innovantes. Porté par l’Idip, ce diplôme est à la fois exigeant, passionnant et gratifiant, comme Pascal Darbon nous en fait part à travers le partage de son expérience de diplômé de la seconde promotion.

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Pascal Darbon est Enseignant-Chercheur, Maître de conférences à la Faculté des Sciences et de la Vie, où il enseigne la physiologie et les neurosciences. Il fait de nombreuses interventions en UE transversales : aide aux projets étudiants, MTU (Méthodologie du Travail Universitaire). Il exerce son activité de recherche au sein de l'INCI, l'Institut des Neurosciences Cellulaires et Intégratives, une Unité de Recherche du CNRS dont il est Directeur Adjoint depuis 2020.

1. Comment avez-vous eu la curiosité de développer votre enseignement avec différentes méthodes pédagogiques ?

Tout a commencé par une rencontre, un peu fortuite, avec la directrice de l’Idip, en 2013. Il y a dix ans, l’Institut de Développement et d’Innovation Pédagogiques venait d’être créé. Je ne savais pas que ce type de formation était disponible.

J’y suis allé par curiosité et je me suis aperçu que ça comblait un manque, car je n’avais finalement pas de formation d’enseignant. J’étais un chercheur, recruté sur mon activité de recherche et sur une partie de mon activité d’enseignement. Toutefois, l’enseignement que je pratiquais ne me plaisait plus véritablement, je ne voyais pas comment m’en sortir.

D’avoir découvert ces ateliers de formation m’a outillé pour reprendre du plaisir à enseigner et, je pense, améliorer mes enseignements.

2. Vous êtes aujourd’hui Directeur Adjoint de l'INCI (Institut des Neurosciences Cellulaires et Intégratives). Diriez-vous que cette évolution de carrière a été portée par votre engagement pédagogique ?

Il faudrait poser la question au Directeur (rires). Je dirais que, oui, indirectement. Mon investissement en pédagogie m’a donné une certaine légitimité en enseignement, qui m’a fait prendre des initiatives et à m’a amené à m’impliquer plus dans la communauté. Surtout, ces formations en pédagogie m’ont permis de franchir un cap dans mon développement professionnel et personnel. Il est possible que ce soit suite à ces formations et à mon implication, au niveau de la faculté et de l’enseignement, que le Directeur d’Unité ait remarqué mon envie de m’impliquer davantage.

3. Le cap que vous évoquez a-t-il été franchi en voyant d’autres personnes autour de vous être dans le même cas, ou bien grâce à la qualité des enseignements reçus et à la confiance que cela vous a apporté ?

C’est tout cela à la fois. L’émulation collective est déterminante. Elle permet de voir ce qui peut se faire, mais aussi comment quelqu’un peut le transposer. On se dit alors : « Non seulement ça existe, mais c’est faisable ». Discuter avec d’autres permet d’identifier des problématiques communes, des spécificités. Finalement, on nous présente plein d’outils et c’est à nous de nous les approprier.

M’outiller professionnellement me permet de reprendre du plaisir à enseigner.

Pour ma part, la confiance en soi est liée à un moment que je rattache au DU PES (Pédagogie de l’Enseignement Supérieur). Je faisais partie de la seconde promotion et Christelle Lison, professeure à l’Université de Sherbrooke, est intervenue dans le cadre d’un séminaire, en expliquant que « le développement professionnel, c’est du développement personnel ». Elle a détaillé : « Si on est heureux de la manière dont on fait ses cours, on fera des cours qui seront mieux ressentis par les étudiants et les étudiants en profiteront plus ». Pour moi, ça a été un déclic. J’ai pris conscience que m’outiller professionnellement me permet de reprendre du plaisir à enseigner.

4. L’une des manifestations de cet engagement est votre inscription au diplôme universitaire Pédagogie de l’Enseignement Supérieur de l’Idip. Parlez-nous-en plus en détail.

Auparavant, j’avais suivi beaucoup d’ateliers de formation. Le DU Pédagogie de l’Enseignement Supérieur relevait d’un autre niveau : il m’a davantage amené à avoir une réflexion sur ma philosophie d’enseignant. Ce DU m’a apporté des connaissances sur les outils permettant la mise en œuvre de cette nouvelle philosophie. Au-delà de cela, il m’a fait découvrir la recherche en pédagogie. Cette démarche scientifique est similaire à celle que je pratique dans ma discipline et la transposition m’a aidé.

Ce que le DU m’a également apporté, c’est une reconnaissance par les autres de mon engagement et de mon expertise. Dans ma discipline, j’ai désormais l’étiquette « pédagogie », au sens positif du terme. J’étais l’un des premiers, mais nous sommes aujourd’hui plusieurs de ma faculté à avoir suivi le DU Pédagogie de l’Enseignement Supérieur.

Quand des collègues me posaient des questions sur mon expérience du DU, je les ai toujours encouragés à faire de même. Ce que je leur disais est que c’est très prenant mais, surtout, très intéressant et valorisant pour soi. Savoir que cela prend du temps est un élément central. Dans notre métier d’enseignant-chercheur, le temps manque généralement, mais le jeu en vaut la chandelle.

5. Selon vous, les enseignants devraient-ils suivre le DU Pédagogie de l’Enseignement Supérieur s’ils sont enclins au développement pédagogique ?

Il n’est pas forcément nécessaire d’aller jusqu’au DU Pédagogie de l’Enseignement Supérieur pour développer son enseignement. Pour autant, ça me semble s’inscrire dans une continuité. Si on suit des ateliers, qu’on y prend plaisir et qu’on y voit une utilité, aller jusqu’au DU est une étape qui permet de mettre plus de réflexivité dans ses actions.

6. Est-il vrai que les ateliers peuvent être une bonne porte d’entrée vers le DU, pour se familiariser avec les méthodes pédagogiques ?

Cela a, en tout cas, été mon parcours. Faire le DU Pédagogie de l’Enseignement Supérieur de but en blanc suppose d’avoir une solide culture en pédagogie, ce qui n’est pas évident pour des personnes de ma génération, qui n’ont pas bénéficié d’enseignements comme ceux vers lesquels les nouveaux recrutés peuvent aujourd’hui s’orienter. Il est donc bon de passer, d’abord, par des ateliers.

7. Au-delà du diplôme, il est possible de faire reconnaître son engagement grâce à la prime de reconnaissance de l’implication pédagogique. Pourriez-vous en dire quelques mots ?

Cette prime se compose de deux éléments importants : d’une part, la reconnaissance de l’investissement et, d’autre part, la pédagogie. Pour moi, elle n’est pas destinée à des experts en pédagogie, mais plutôt à des enseignants qui fournissent un effort. Je pense à des enseignants qui souhaitent se renouveler ou qui veulent améliorer leur pédagogie et qui, de fait, y consacrent du temps. C’est une reconnaissance du temps et de la matière investis.

Je suis très satisfait d’avoir obtenu cette prime. Elle a été créée à Strasbourg et est devenue nationale. Elle a aujourd’hui disparu en tant que telle pour les enseignants-chercheurs, toutefois le RIPEC (Régime Indemnitaire des Personnels Enseignants et Chercheurs) a une composante individuelle couvrant sept critères, dont un relatif à l’investissement pédagogique. La prime imaginée à Strasbourg gagnait à être connue et c’est désormais davantage le cas avec le RIPEC.

8. En quoi le développement pédagogique est-il important pour un enseignant ?

Se développer professionnellement est important dans tous les métiers, mais c’est encore plus vrai, à travers la pédagogie. Pour les enseignants-chercheurs à l’Université, c’est quelque chose qui n’existait pas ou peu ou, du moins, qu’on ne connaissait pas bien. L’Idip a vraiment comblé un manque. Permettre ces formations pour travailler le développement pédagogique, c’était nécessaire et, encore actuellement, c’est indispensable. À mon sens, cela se reflète forcément dans la qualité des enseignements de manière générale.

9. Plus largement, pourquoi le partage de pratiques ou d’initiatives pédagogiques est-il enrichissant ?

Le partage est toujours enrichissant. Partager, c’est un acte réciproque : on dit ce qu’on fait soi et on écoute le retour qui nous est formulé. Partager, c’est donc essentiel.

Du fait de notre manque de temps, avoir des lieux dédiés à l’échange permet d’aller à l’efficacité. Les échanges constituent un retour de bonnes pratiques, ils diffèrent d’une conférence sur la pédagogie. Ce qui est intéressant, c’est lorsqu’un collègue s’exprime sur sa pratique en disant : « Voilà ce que j’ai fait dans les conditions qui sont les miennes ». Cela permet également de découvrir des outils et de se demander si on peut ou si on veut les transposer. En somme, ce partage d’expériences, c’est la salle des profs idéale !